top of page
Rechercher

Gisèle Halimi, merci

Photo du rédacteur: Inter SectionsInter Sections

28.08.2020 Je pensais encore à elle hier soir. Son absence me laisse un trou dans le coeur. Je n’admire personne plus que Gisèle Halimi. Je lui avais écrit une lettre il y a cinq ans, pour lui dire merci pour tout. Je pense à cette lettre depuis cinq ans. J’avais même acheté des petites enveloppes du M.I.T pour que ça fasse stylé et qu’elle kiffe. Je m’étais promis de lui envoyer cette lettre le temps d’arranger mes tournures lourdes et ma syntaxe défaillante. Je voulais la lettre parfaite. Je m’étais promis de lui envoyer cet été. J’y repensais hier, mais aujourd'hui elle n'est plus là.


Femme tunisienne, issue d’un milieu populaire, Gisèle Halimi était une avocate exceptionnelle, qui luttait sans complaisance contre toute forme d’asservissement. Elle m’a fait cadeau d’un exemple. Je me souviens encore de ses mots qu’elle avait écrit, à treize ans, dans son journal intime : « Aujourd'hui j'ai gagné mon premier petit bout de liberté ». Elle venait d’achever une grève de la faim pour ne pas avoir à faire le lit de son frère. J’y repense souvent.


Gisèle Halimi était là, pour assurer la dignité de chaque être humain. Elle était là pour défendre les droits des femmes. Ses plaidoiries ont permis la dépénalisation de l’IVG et la criminalisation du viol. Ses efforts ont fait de la France un endroit meilleur pour toutes les femmes.


Consciente des relations de dominations qui s’exerçaient dans le monde, elle était là pour les tunisiens, les yougoslaves, les algériennes, les viêtnamiens. Ces idéaux pacifistes et anti-coloniaux l’ont conduite à lutter pour l’indépendance de la Tunisie et de l’Algérie; et même à défendre les palestiniens au sein du « Tribunal Russell pour la Palestine », elle qui a grandi dans une famille juive. Elle ne « voulait pas se taire ». Gisèle Halimi n’avait pas peur de dénoncer les sévices et les injustices, partout. Elle ne craignait pas d’ébranler des institutions en mettant en lumière la pratique de la torture et du viol par l’armée française pendant la guerre d’Algérie. Elle a été condamnée trois fois à mort par l’OAS, emprisonnée durant un mois à Alger.


Elle n’avait pas non plus peur de la pauvreté. Elle vivait dans un deux pièces avec ses deux fils, alors qu’elle défendait les militants du FLN. Elle a choisi l’éthique plutôt que les lovés. Elle a fini avec les deux. Bien que je ne partage pas toutes ses idées, notamment sur la question du voile, Gisèle Halimi est ma plus grande source d’inspiration. Elle m’a montrée qu’une femme arabe pauvre pouvait lever le monde. Elle m’a épaulée, à son insu. J’ai le coeur émietté de ne pas l’avoir remercié, même avec mes tournures lourdes et ma syntaxe défaillante. J’espère moi aussi, un jour, épauler les autres, comme Gisèle Halimi.


Merci pour Bobigny, merci pour les syndicalistes et des indépendantistes tunisiens, merci pour Djamila Boupatcha, merci pour les 343, merci pour le Tribunal Russell, merci pour Tonglet et Castellano merci pour ATTAC, merci pour le Viêt-nam merci pour les femmes, merci pour la paix.


J’ai l’impression d’avoir perdu une mère qui ne m’a pas vu naître.


De la part de toutes les femmes, merci Gisèle.


Nisrine MBARKI












 
 
 

Kommentare


Post: Blog2_Post

Subscribe Form

Thanks for submitting!

©2019 par Intersections. Créé avec Wix.com

bottom of page